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LA GESTE DE RAXUS
Part 1 : Avant la tempête


-Raxus !
Le chef du clan le souleva par le cou.
-Tu devrais être aux rituels du matin ! Cours-y ou tu tâteras de ma hache.
Le garçon se releva. Du haut de ses 15 ans, il aurait pu intimider quelqu'un d'autre. Mais pas Brojfol. Le géant, qui faisait presque 2 mètres, le terrifiait proprement. Pas seulement lui. Le village lui était entièrement soumis, et ce depuis l'hiver dernier.
Il avait débarqué un soir, lui et ses acolytes faits de poils et de muscles. Le chef d'alors, Zelfos, les avaient accueillis. Raxus aimait bien Zelfos. Ça avait été, pour le village, un grand chef. Il avait mis en place une hiérarchie stable et l'économie s'était peu à peu relancée. Brojfol semblait tout le contraire de Zelfos. Sous sa domination, seuls les forts dominaient. La démocratie installée par l'ancien chef, que Brojfol avait décapité lors de leur rencontre, s'était transformée en une méritocratie sanglante ou chacun se devait de faire le plus de mal aux autres pour survivre.
Raxus se cala contre l'inconfortable banc de l'église , qui n'avait d'église que le nom car il ne s'agissait que de pierres grossièrement taillées empilées par les serviteurs de Brojfol.
Le sermon était assommant. Tous ces dieux, ces explications obscures sur le fonctionnement de l'univers... Voilà pourquoi Raxus jouissait d'une si mauvaise réputation dans le village. Il était sceptique.
Comment croire à une chose expliquée par des gens qui disent eux-mêmes ne pas les comprendre ?
Ne voyaient-ils pas la logique derrière la chute de la pluie et les chutes de neige ? Ne comprenaient-ils pas la simplicité du vent, et la rationalité des tremblements de terre ?
Hélas, Raxus était désespérément seul. Répudié par sa famille rejeté par ses amis, personne ne voulait entendre ses explications sur le fonctionnement de l'univers.
Le prêtre termina sa prière, et les portes s'ouvrirent. C'était l'hiver. Habillé d'une chaude tunique de cuir, il marcha lentement vers son abri.
Il vivait un peu à l'écart du village, sur une petite île. Quelques arbres poussaient, des oiseaux y vivaient. C'était son lieu de repos, loin de la haine et de l'ignorance des autres. Dans l'âtre, une bûche finissait de se consumer.
Il sortit un morceau de viande de son sac en peau. Il inséra la chair de cochon sur le four.
-Plus de charbon...
Il ouvrit son coffre. Sous une pile de pioches et de haches, on mice filet de poussière noire lui fila entre les doigts.
-Il ne reste rien, décidément.
Il attrapa une pioche en pierre et sortit. Il fit le tour de son foyer, passa devant les blés qui ne germaient pas en raison du grand froid, et passa le porche de sa mine.
Il lui avait fallu plusieurs jours pour la creuser, mais elle était extrêmement bien bâtie. A la différence des barbares qui se contentaient de creuser des trous de manière complètement aléatoire, la logique de ses tunnels augmentaient les probabilités de tomber sur des minerais et les indications régulières lui permettait de se retrouver sans problèmes tandis que les cas de disparitions souterraines étaient fréquents dans le village.
L'étage auquel il se trouvait ne lui apporterait plus rien. La zone était quadrillée dans tous les sens, et trouver du charbon rapidement lui était difficile tant il aurait du aller loin dans ses excavations pour dénicher ce qu'il voulait.
Il continua donc son escaliers vers le bas, et attaqua une nouvelle série de tunnels. Il creusait prudemment, loin des murs.
Sa mine s’enfonçait loin, maintenant. A quelle profondeur se trouvait-il ? Il consulta le panneau près de lui, sur lequel était inscrit d'une écriture claire et rapide «  couche 20 avant N0 »
Le niveau 0, il ne l'avait atteint qu'une fois : par hasard. L'excavation s'était finalement éboulé et ses recherches perdues. Seul la géolocalisation était restée, et il espérait rapidement y revenir.
Son tunnel progressait. Il poussa les débris de roche derrière lui. Donnant un coup de pioche qui aurait pu être un coup sans histoire, il fut surpris de se retrouver couvert d'un étrange poussière rouge.
-Mais qu'est-ce que c'est que donc … ?

Il ramassa l'étrange minerai et le mit dans son sac. Il remonta. Son besoin de charbon était passé au second plan, cette découverte devenant bien plus importante, malgré son estomac gargouillant, que sa cotte de porc crue.
Une fois en haut, il s’aperçut que la poudre laissait des petites traînées sur le sol, et il s'arrêta. Si quelqu'un venait, il serait découvert, et il voulait tout sauf une intrusion des barbares chez lui pour inspecter sa découverte.
Il fallait l'étudier dans un endroit plus... secret.
Il poussa des planches apparemment fixées au mur, qui coulissèrent et révélèrent une pièce remplie d'objets en tout genre. Tout ce qu'il ne voulait pas que les barbares trouvent était la : expériences, minerais rares, nourriture, peintures, livres, tout ce qui lui était cher et tout ce qui les importunait.
La construction de cette pièce était devenu un besoin peu de temps après son installation hors du village. Des bandes d'habitants du village passaient alors régulièrement le piller. Mais depuis l'installation secrète faite dans le mur, les barbares ne passaient plus, sachant qu'ils ne trouverait rien. Et l'idée que Raxus vivait dans la misère s'était installée au village, et cela ne lui déplaisait pas. Il était ainsi tranquille.
Il fit de la place sur son établi. Il poussa les leviers, les cordes qui ne lui servaient à rien.
Il déposa la poudre sur son bureau et la regarda de plus près.
A première vue, rien ne paraissait digne d’intérêt dans cette étrange matière. Mais il remarqua qu'au toucher, elle illuminait la pièce d'une lueur faiblarde. Une idée d'éclairage automatique lorsque l'on ouvrait la porte lui passa par la tête. Il fit passer un petit chemin de poudre vers la porte. Tandis que le petit canal s'étalait de la porte jusqu'à l'établi, il dérapa sur une pierre proéminente et tomba dans le fourbi environnant, actionnant le levier.
L'effet le surprit plus que l'aurait fait l'allumage automatique.
La porte s'ouvrit toute seule, dévoilant le passage.
Raxus, stupéfait, désactiva le levier.
La porte se ferma.
Une matière capable de transporter l'énergie et de la transmettre à l'environnement...
Un sourire éclaira son visage.
De longues heures de travail l'attendait.